
J’ai appris le décès du Chairman du SDF Ni John Fru Ndi. Malgré des problèmes de santé récurrents je ne pouvais pas me taire.
Ni John Fru Ndi est le SEUL homme politique que j’ai soutenu activement en mettant tout mon groupe de presse au service de sa politique.
Le hasard ou bien la logique a voulu que Pius Njawe, Tchounkeu et moi soyons dans le même état d’esprit au point où le ministre Fame Ndongo va nous qualifier de “Sainte trinité”.
Il est de bon ton de ne dire que du bien d’un homme suite à son décès : je ne sais pas le faire et je ne ferai pas ici.
POURQUOI J’AI PRIS TANT DE RISQUES POUR SOUTENIR FRU NDI
Tout part d’un entretien avec Célestin Monga: moi, j’étais un supporteur de Samuel Eboua qui représentait pour moi, la grandeur du Cameroun, alors président de l’Undp, le parti politique le plus puissant de l’époque. Lorsqu’il est débarque par les petites combines du ministre Bello, je suis, comme de nombreux camerounais, très triste.
Alors, Célestin Monga me dit avec un sourire moqueur : “qui va être ton nouveau champion ? ” Je ne sais pas, lui ai-je répondu.
“Que penses-tu de Ni John Fru Ndi ” Et moi de répondre: ” Un anglophone ? ” et lui de répliquer, ” un anglophone n’est pas Camerounais ” Avec de tels arguments et contre arguments, la messe était dites.
J’aimerais citer les exemples de ce que j’ai apprécié chez cet homme qui restera dans l’histoire de ce pays :
1- Lorsque le Professeur Siga Assanga et ses confrères reprennent partiellement les idées de Albert Mukong et autres en vue de créer un parti politique; une question se pose: qui va en prendre la tête.
Dans ces années 90, il n’y a pas beaucoup d’hommes courageux dans ce pays. Siga Assanga propose son parent, ancien libraire à Bamenda car, dit-il, il est “assez fou pour accepter”. Fru Ndi accepte avec beaucoup de “gourmandises”.
2- Le fait que ce quasi illettré ait pu contenir des gens avec un certain ego comme le Dr tcheuko, Taku Alexander, la professeure Dorothy Kom, Ben Muna…et plus tard s’imposer à la tête de l’Union Pour le Changement truffe d’intellectuels et tenir une campagne électorale très difficile, mérite du respect.
3- Qui a entendu un véritable discours de Fru Ndi lors de cette campagne électorale ? Mais il était en phase avec son peuple et son “Power To The People ” provoquait sur les Camerounais une espèce d’envoutement.
4- J’ai une conviction proche des certitudes: il a roulé tous les couards intellectuels qui l’ont envoyé au “casse-pipe” dans l’espoir de le remplacer lorsque les temps seraient plus cléments. Le bâtonnier Muna n’en a toujours voulu jusqu’à son décès.
Un autre très haut cadre du Sdf m’a agressé un jour en s’écriant : ” Zébazé, vous et vos amis êtes en train de détruire ce pays. On va à l’élection présidentielle et vous voulez que nous soyons représentés par un illettré ? Je dis bien un illettré ”
J’étais intérieurement content car illettré ou pas, Fru Ndi les avaient devancé à la régulière.
4- Face à autant de vautours, il a su mettre de l’ordre en excluant tous ceux qui allaient contre les règles du parti avant de dériver, malheureusement, sur la fin, vers une espèce d” autocratie: un parti à besoin d’ordre et des règles respectées : il avait oublié l’un des 2 à la fin.
Malgré cela son parti est encore debout 30 années plus tard : que chacun fasse autant avant de le critiquer.
5- Enfin les Camerounais ne s’imaginent pas les temps hostiles qui polluent l’atmosphère politique; lorsqu’il décide de lancer son parti contre l’avis du gouvernement: personne n’y croit, surtout moi.
La veille de l’événement, le Colonel chargé du “corps expéditionnaire” l’appelle pour le supplier de tout arrêter car il a “un permis de tuer”: Fru Ndi lui répond ” je ne peux plus, si j’arrête, les populations vont me tuer. Je préfère être tué par vous”. Des paroles qui frappent aussi forts que celles de Mandela au procès de Rivonia, avant d’aller en prison pour de nombreuses années.
Le lendemain, à la tête de ses supporters, le lancement du parti a lieu hélas, avec 6 morts tués par balles.
QU’EST CE QUE JE N’AI PAS AIMÉ ?
Je sais que ça peut énerver, mais je ne sais pas faire autrement.
1- J’ai déjà raconté cette affaire plusieurs fois tant cela m’a choqué.
Lorsque Fru Ndi rate la présidence de la République d’un poil, il tient à voir, toute “affaire cessante”, Pius Njawe, Séverin Tchounkeu et moi.
Nous allons le rencontrer à son Qg. Il dit ne pas savoir comment nous remercier; que sans nous, jamais il ne serait là…
Quelques années plus tard, alors que Njawe est à l’étranger, un journaliste écrit un article contre le SDF et Fru Ndi. Ce dernier porte immédiatement plainte or il sait très bien le sort que la justice nous réserve en ces temps-là.
Lorsque Njawe perd son épouse dans un tragique accident, il se présente avec une forte délégation : je ne répète pas ce que Njawe m’a dit quand on est allé les accueillir.
2- Lorsque Biya vient à Bamenda, il accourt pour entre autre présenter son fils; il accepte que Paul Biya paye les soins de santé de son épouse; on le voit danser avec le ministre Grégoire Owona alors que le peuple souffre…pense-t-il aux nombreux morts, aux nombreux sacrifices des uns et autre pour que Ni John Fru Ndi devienne le “CHAIRMAN” ? “.
Cela dit, lorsqu’on écrira la vraie histoire du Cameroun, son nom sera en bonne place puisqu’à ce moment-là, ce sera bilan contre bilan.
Benjamin ZEBAZE