Cabral LIBII jusqu’à ce jour demeure un mystère politique, pour le Camerounais ordinaire. Pourquoi s’est-il lancé dans la mobilisation en vue de l’inscription massive (11 millions) des Camerounais sur les listes électorales ? D’où tire-t-il les ressources nécessaires pour parcourir le Cameroun ? Sera-t-il candidat à la prochaine élection présidentielle? Autant de questions, et bien d’autres, que soulève à chaque fois le passage de ce jeune compatriote de moins de 40 ans. Notre journal l’a rencontré lors de son passage samedi dernier 1er juillet 2017 à Dschang.
Quel est l’objet de votre séjour à Dschang ?
Je suis à Dschang parce que je suis invité par un groupe de jeunes qui se sont organisés pour servir de relai, au niveau du département de la Menoua, de l’opération 11 millions d’inscrits que j’ai lancée il y a environ un mois.
J’étais également invité à Bafoussam ce même jour par un groupe de jeunes qui s’est également organisé là-bas. Mais eux, ils étaient suffisamment organisés parce qu’ils ont organisé un point d’inscription massive, comme cela est coutume depuis qu’on a lancé l’opération. Ils ont saisi ELECAM et beaucoup de gens s’y sont rendus. Je suis venu les encourager et communier avec ces compatriotes qui ont décidé de répondre à l’appel que j’ai lancé.
Les jeunes de Dschang ont envoyé une délégation à Bafoussam à ma rencontre, et puis parmi eux il y a un qui était partie de cette conférence de presse de l’événement culturel qui aura lieu dans la Menoua et puis je me suis dit, écoute !, si les jeunes m’invitent pour que je vienne les encourager, toucher du doigt le travail qu’ils font, et beh c’est la moindre des choses. C’est pour ça que je suis là.
Cabral LIBII si l’on s’en tient aux réseaux sociaux, on pourrait dire que tous els camerounais soutiennent votre initiative. Mais il y a quand même quelques voix qui contrastent. Avez-vous lu la dernière sortie du Chief MILA ASSOUTE ?
Oui
Comment est-ce que vous l’appréhendez, vous qu’il qualifie de « fils spirituel » ?
Il y a deux choses que vous dites. La première c’est que tout le peuple camerounais me soutien. Je suis très heureux et très flatté de l’entendre. Mais je n’en aurais la preuve que lorsque j’aurais atteint les 11 millions d’électeurs. Merci déjà pour ce soutien du peuple, et il faut que ça se concrétise.
La deuxième chose c’est la sortie de MILA ASSOUTE. Depuis quelques jours je fais l’objet de beaucoup d’intérêt de la part d’un certain nombre d’acteurs qui se recrutent de plusieurs strates de la société et il y en a qui tiennent à mon endroit des propos aimables et d’autres des propos beaucoup moins aimables. Le propos de MILA ASSOUTE, puisque c’est l’essence de votre question, était plutôt mitigé. Je peux le restituer en trois points : D’abord il saluait l’initiative. Il s’en félicitait. Il rappelait de façon appuyé que j’étais son fils spirituel et puis il émettait des doutes sur l’efficacité d’une inscription massive sur les listes électorales. Je ne vais pas revenir sur le point de l’auto satisfaction. Mais sur mon statut de fils spirituel il faut juste dire rapidement qu’en 2004 je suis membre d’une association qui s’appelait, et qui existe toujours, le Forum National des Jeunes. Et nous avons publié un appel d’un de 1000 étudiants de toutes les universités , et un autre de 5000 étudiants appelant au rejet de Paul BIYA comme président réélu de la République du Cameroun. J’en étais le porte-parole. Beaucoup de jeunes ne le savent pas. Ça fait treize ans. C’était un 15 avril 2004 que je faisais la une de quatre journaux au Cameroun, avec ma photo et que je donnais des interviews pour la première fois par RFI et BBC, entre autres. Ces interviews existent encore. Je crois avoir mis en circulation cette interview que j’avais faite à Mutations par Romuald NKONLAK et NGONGANG qui est aujourd’hui à Africa 24. Après cette sortie, effectivement, Chief MILA ASSOUTE qui était le mandataire du courant des Modernistes du RDPC avait demandé à me rencontrer. On était allé à sa rencontre et il nous avait présenté son projet qui nous avait flattés à l’époque. Nous qui avions appelé à la non élection de Paul BIYA, ça nous plaisait de voir qu’au sein du RDPC il y avait un schisme qui s’était créé et que ce schisme-là voulais un renouvellement du personnel politique au sein du RDPC et y compris à la présidence de la république. Ils avaient d’ailleurs commis un ouvrage à l’époque qu’on appelait el Livre Blanc du courant des Modernistes qui rappelait les différentes résolutions subséquemment aux différents congrès du RDPC. Ça nous avait accrochés. Ça nous a beaucoup plu. Ce qui fait que nous avons décidé, à l’époque, au FONAJEUNES, de le soutenir. En réalité c’était tout un groupe de personnes : Sam PENDA EKOKA qui est toujours au Cabinet Civil. Effectivement, dans le cheminement que nous avons eu, nous avons beaucoup appris de ces aînés-là, notamment du Chief MILA ASSOUTE. Nous étions, dans cette affaire, des grogneurs étudiants ? Mais on n’était pas des acteurs ou des personnages politiques en tant que tel. Ce cheminement a ensemencé en nous, en moi les germes de ce qui a grandi peut-être aujourd’hui et qui me conduit à mener une activité comme celle-ci. Donc je ne peux en aucun cas nier le fait que j’ai cheminé avec le Chief MILA ASSOUTE et je puis vous dire aujourd’hui tout le plaisir qui est le mien d’avoir été à cette initiation-là. Je me rappelle de quelqu’un de très courageux – on dit de moi que je suis courageux- parce que à l’époque affronter Paul BIYA –vous savez qu’il avait démissionné du RDPC, avait créé son parti politique le RDMC. On avait rejet de façon ridicule sa candidature et vous savez comment ; on a soutiré une pièce à la Cour Suprême pour justifier le rejet de sa candidature. Donc c’est quelqu’un qui m’impressionnait beaucoup par son courage, par son éloquence, par sa maitrise d’ailleurs du RDPC et par sa maitrise des sujets. Bon maintenant il a un passé beaucoup plus compliqué que ça. Il était membre du Comité Central du RDPC, Conseiller spécial du Président de la République. Maintenant qu’il dise que je suis son fils spirituel, je dis que c’est tant mieux. Je pense que si c’était le cas il aurait soutenu, tout de go, l’initiative que je mène.
Et que lui répondez-vous, parlant de l’efficacité de la campagne pour l’inscription massive sur les listes électorales ?
Sur le troisième point, celui de l’inefficacité du projet que j’ai lancé, sur ce coup-là Chief MILA ASSOUTE n’est pas le seul. Il est rejoint ou précédé par d’autres acteurs que tels ELIMBI LOBE et beaucoup d’autres qui disent que ça ne sert à rien de s’inscrire sur les listes électorales. Alors, la question que je pose : le Code électoral qu’ils revendiquent à corps et à cri la révision avant d’aller aux élections a été adopté en 2012. Et j’ai d’ailleurs demandé à monsieur ELIMBI LOBE si ce Code électoral était si mauvais pour quoi n’avoir pas exigé sa révision avant 2013 si vous êtes allé aux élections? Je crois qu’il s’agit d’une diversion. Le secret, si on veut le changement, c’est d’aller aux élections. Moi, je pense que le seule voie royale pour la démocratie c’est les élections. C’est pourquoi je demande à mes concitoyens de s’inscrire sur les listes électorales et le cas échéants ils voteront pour qui ils voudront.
Vous appelez les jeunes à aller à la conquête des mairies, de l’assemblée nationale. Et quant à la question de savoir si vous serez candidat à l’élection présidentielle de 2018 vous répondez au journaliste d’Equinoxe TV que « l’élection présidentielle n’est pas la samba »
Mais l’élection présidentielle n’est pas un carnaval. Ce n’est pas une samba. Vous avez l’impression que les gens, aujourd’hui, s’empressent de déclarer la candidature comme si c’était une affaire où on venait grimacer devant les gens. Avant de déclarer sa candidature il faut d’abord s’inscrire, s’assurer que les gens vont s’inscrire sur les listes électorales. On était 7 millions et demi d’électeurs en 2011. Six ans plus tard, après la réforme, on n’est que 6 millions et demi, c’est-à-dire un million de moins. Alors les partis politiques ont été incapables de faire que les gens s’inscrivent pendant six ans. Si vous êtes incapables de faire inscrire les gens, qui va vous voter quand vous irez aux élections? Il n’y aura personne. Donc le premier défi c’est d’amener les citoyens à s’inscrire sur les listes électorales, de les amener sur le champ électoral, et après on leur propose un projet de société, et on leur offre des profils humains de personnes qui peuvent porter ce projet de société. Donc j’estime que c’est prématuré, totalement inopportun de se pavaner devant les gens en agitant qu’on est candidat. D’aucuns estiment que la bonne démarche c’est de commencer d’abord par déclarer sa candidature par le haut, et ensuite redescendre chercher les électeurs. Moi je pense qu’il faut commencer par les électeurs et puis monter vers la candidature.
Cette opération que vous menez n’est pas légale. Sinon comment avez-vous apprécié l’agissement des forces du maintien de l’ordre au CRADAT la fois dernière ?
Je pense que c’est la réaction des forces du maintien de l’ordre qui était illégale. Parce que si vous lisez le code électoral du 14 avril 2012 et révisé le 23 décembre de la même année d’ailleurs, je peux me tromper, les inscriptions sur les listes électorales sont une opération citoyenne qui peut être menée par toutes les forces vives d’une nation, par des personnalités, par les partis politiques, par des associations. Je pense que je ne suis pas le seul initiateur d’une opération. Il y en a qui sont de l’ordre de 15 millions d’inscrits portés par d’autres personnes. Personne n’a trouvé à redire sur tous ceux-là qui ont fait ceci avant moi. La vraie question aujourd’hui c’est pour quoi c’est quand c’est Cabral LIBII qui se lance dans cette opération que ça provoque autant d’émules, autant de réaction ? J’appelle ça une vendetta. Les gens ont appelé à inscrire sur les listes électorales, pour quand c’est moi ça pose problème ? Peut-être que je fais peur à certaines personnes. Je voudrais les apaiser. Je ne viens pas arracher quelque chose à quelqu’un. Ces gens qui s’inscrivent, ces jeunes qui s’inscrivent, je les arrache à qui ? Je ne pense pas que je sois quelqu’un à craindre.
D’aucuns disent que Cabral LIBII serait la face cachée de l’isberg MRC.
Ah bon ! Mais vous voyez les gens qui m’insultent sur les réseaux sociaux ? Il me semble qu’ils sont pour la plupart des militants du MRC. En tout cas ils se revendiquent comme tels. Ce sont des fervents partisans du professeur KAMTO et je le regratte d’ailleurs. Parce que je ne suis pas sûr que le MRC de Maurice KAMTO, de Alain FOGUE, de OKALA EBODE et autres soit le MRC de personnes aussi injurieuses et insultantes. Je ne crois pas. Donc ceux-là ils sont un peu des extrémistes qui estiment que je viens soit créer du désordre dans l’opposition soit siphonner au MRC son électorat. Non je pense qu’on est dans de l’affabulation, dans des histoires complètement tordues. Je ne suis la face visible de rien du tout. Je suis un citoyen camerounais qui mobilise d’autres citoyens à s’inscrire sur les listes électorales. Maintenant comme tout autre citoyen j’ai le droit, lorsque le moment sera venu, d’être candidat à l’élection présidentielle, d’être candidat aux municipales, d’être candidat aux législatives. Sauf les sénatoriales parce que je n’ai pas encore quarante ans. Alors quel est le procès qu’on me fait au juste ?
On vous a vu avec des tas de livre d’Emmanuel MACRON. Est-ce votre modèle politique ?
Mais j’ai des tas de livres d’Emmanuel MACRON, j’ai des tas de livre de SANKARA, j’ai des tas de livres de KADHAFI, j’ai des tas de livres de LUMUMBA, j’ai des tas de livres de CHIRAC, j’ai des tas de livres de SARKHOZI, j’ai des tas de livres de POUTINE, j’ai des tas de livres de YASSER ARAFAT. Suis-je donc le disciple de toutes ces personnes ? Oui toutes les personnes qui ont réussi inspirent des générations. Où est le mal si je m’inspire de quelqu’un qui, à 39 ans, devient le président de la Cinquième puissance mondiale ? Où est le péché ? En tout cas moi je n’en trouve pas.
Monsieur Cabral LIBII, dites-nous, où prenez-vous les ressources pour votre action sur le terrain ?
Mes ressources, pour le moment, sont mes économies ; sont les économies des personnes qui m’accompagnent. Je vais vous poser une question : ces jeunes qui se sont déplacés aujourd’hui de Dschang pour venir me rencontrer à Bafoussam, demandez-leur si c’est moi qui leur ai payé le transport, demandez-leur si c’est moi qui ai mis le crédit dans leurs téléphones. Ces jeunes qui se sont mobilisés à Bafoussam, ce sont des professeurs de lycées, des étudiants et autres qui ont loué une tente pour accueillir l’équipe d’ELACAM. Demandez-leur si c’est moi qui leur ai donné de l’argent. Allez demander à ceux-là qu’on est allé chasser à Ngoa-Ekellé. Allez demander à ces jeunes qui sont mobilisés aujourd’hui au stade de Bepanda avec des tee-shirts, des gadgets et autres. Ils ne m’ont pas vu. Demandez-leur si je leur ai donné de l’argent. Allez demander aux jeunes qui sont mobilisés aujourd’hui à Bertoua, à ceux qui sont à Maroua, à Garoua, à Tibati, à Loum ; je vous cite-là quelques villes qui se sont mobilisées aujourd’hui. Demandez-leur si c’est moi qui leur ai donné de l’argent. Mais donc vous pensez vraiment que mes compagnons avec qui je suis venu ici aujourd’hui, si on se concentre, pour trouver 1000 francs chacun mettre un peu d’argent dans une vieille voiture qui nous transporte pour arriver à Dschang et à Bafoussam, villes où nous sommes souvent allés en d’autres occasion pour des mariages, pour des…maintenant nous voyons utile et on commence à chercher les gens qui sont derrière nous et qui nous donnent des milliards. Vous croyez que si on avait des milliards on serait venu comme on est là ? On serait venu comme ceux qui sont souvent venus avec de l’argent et vous savez comment ils viennent souvent.
Quel regard le camp de Paul BIYA porte sur cette activité que vous menez, avez-vous eu à échanger avec des collaborateurs du président de la République à ce sujet?
Vous pensez vraiment que, en même temps qu’on me soupçonne d’être le pion de Paul BIYA, maintenant vous me demandez de vous dire comment il me regarde. Non. Je ne sais pas comment il me regarde. Pour tout vous dire, ça ne me préoccupe pas. Ce qui m’intéresse c’est vous. Est-ce que vous êtes inscrits sur les listes électorales ? Où est Paul BIYA dedans ? Où est le regard de Paul BIYA dedans ?
La campagne que vous menez pourrait être handicapé par le problème de la carte nationale d’identité pour laquelle on doit débourser jusqu’à 7000 francs pour se faire établir une.
Pour obtenir sa carte nationale d’identité il faut 7000 francs. Pour le moment c’est la loi et il faut s’y plier question pour lancer un appel au président de la République pour qu’il institue la gratuité de la carte nationale d’identité. J’espère que vous relayerez le massage que je viens de faire passer à partir d’ici à Dschang.
Propos recueillis par Augustin Roger MOMOKANA