Le fait de dire qu’un compatriote est « bamiléké » ou « béti » sera-t-il désormais considéré comme une infraction ? Le fait de dénoncer l’antipatriotisme observé chez un compatriote sera-t-il considéré comme de la haine ou de la stigmatisation ?
Sans avoir mené une vaste campagne d’éducation et de sensibilisation des populations sur les concepts de « tribalisme », « xénophobie », « haine », « violence », etc. le ministre de l’Administration territoriale (MINAT), Paul ATANGA NJI, annonce de sanctions fortes contre les personnes qui se rendront coupables de discours de haine et de xénophobie, d’incitation à la violence. C’est quoi la haine ? Qu’est-ce que le tribalisme ? Qu’est-ce que la xénophobie ? Quand y a-t-il tribalisme ? A quoi renvoie le terme violence ?
« Les coauteurs et les complices seront poursuivis et condamnés au même titre que les auteurs des infractions susmentionnées », tempête le MINAT avant d’ajouter que des instructions sont d’ores et déjà données aux autorités administratives afin qu’elles « prennent des mesures conservatoires allant de la suspension d’activités à la fermeture des organes de communication, des médias et des supports médiatiques devenus des vecteurs de propagation des messages faisant l’apologie du tribalisme, de la xénophobie et de la haine.
En clair, il s’agit de toute personne qui se rendra coupable de propos haineux, des médias et des supports médiatiques utilisés pour véhiculer les messages de xénophobie et de la haine. La décision du gouvernement fait suite de la « prolifération des discours de haine, de xénophobie, l’exacerbation du tribalisme et la stigmatisation de certains groupes ethniques ou de certaines composantes de notre société.»
Pour dissuader les Camerounais, un le MINAT convoque l’article 77 de la loi 2010/007 du 21 décembre 2010 relative à la cybersécurité et à la cybercriminalité au Cameroun, l’article 241-1 de la loi n°2019/020 du 24 décembre 2019, modifiant et complétant certaines dispositions de la loi 2016/007 du 12 juillet 2016 portant code pénal qui réprime l’outrage à la tribu ou à l’ethnie.
Des références susmentionnées, Paul ATANGA NJI fait savoir que les peines seront doublées si les personnes mises en causes sont des responsables des partis politiques, les fonctionnaires, les responsables des médias, les gens de la société civile, les membres des formations religieuses. Il est évident que le ministre de l’Administration territoriale, à travers son communiqué de presse, vise en priorité les médias, les réseaux sociaux qui promeuvent les discours qui encouragent les replis identitaires.
Pourquoi cette cible précise ? Le gouvernement s’apprête-t-il à écarter des adversaires politiques, des médias qui ne sont pas aux ordres, des cadres gênants de la société civile ? Qu’est-ce qui peut justifier l’indexation d’une catégorie précise de citoyens alors que le fait d’avoir inclue dans les lois les expressions discriminants et stigmatisants (autochtone, allogène, tribu, ethnie) est déjà en soit une infraction ? 2025 n’est plus loin !
Les Camerounais devront dorénavant faire attention au risque d’être happés par le vautour déployé et prêt à incarcérer pour un (01) à deux (02) ans, assortis d’une amende de 300 000 FCFA à 3 millions FCFA.
Augustin Roger MOMOKANA