
Etienne de Tayo pendant le congrès Toula Dizong
Le congrès biennal du village Toula Ndizong, dans le groupement Foto, s’est clôturé dimanche 18 août, après trois jours d’intenses activités.
Dr Etienne Tayo revient ici sur le contexte de cette célébration du 16 au 18 août, en même temps qu’il nous révèle les ambitions de Toula Ndizong dont il est le président du comité de développement.
Congrès 2019 c’est déjà l’apothéose. Quel est votre sentiment à l’instant même ?
Nous avons fait trois jours de congrès. Et qui ont été des jours, je pense, palpitants. On ne peut pas véritablement s’apprécier soi-même. Cependant pour qu’une fête commence à 9h pour s’achever à 17heures et que la cour soit toujours pleine il faut que les gens y trouvent un intérêt.
Aucune œuvre ne naît sans difficultés. Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
Dans ma philosophie du développement, la fête doit être une célébration de quelque chose. On doit fêter parce qu’on a gagné un projet. Parce qu’on a réalisé un projet. Au début je ne me faisais pas comprendre par les populations, mais je crois qu’aujourd’hui elles m’ont compris. Je leur disais que s’il n y’a pas une réalisation de fait, je ne vois pas pourquoi on doit fêter. C’est pour ça que cette année nous avons inauguré le pont de l’émergence. Il s’agit d’un pont qui relie deux quartiers : Tsinmegni et Ndzeng Kessock. Et qui sert justement à désenclaver Ndzeng Kessock. Nous avons pu réaliser des dos d’âne sur notre route où on assistait à de véritables hécatombes.
Donc les difficultés c’est de faire comprendre. En même temps ces gens vont vous dire « on ne cotise pas notre argent pour qu’on mange », en même temps ces gens vont te demander de donner de l’argent pour qu’ils mangent. » Ils vous disent quelque chose et son contraire à la fois. Il faut gérer ce paradoxe-là.
Mais comme je le dis toujours je suis un partisan du temps. Je pense qu’en toute chose il y a une sorte d’apprentissage. Et qu’ont finit par apprendre, et que le temps est le seul maitre qui finit par faire comprendre.
Au début j’ai parlé du développement participatif. En impliquant tout le monde, à tous les niveaux. Parce qu’avant la conception du développement était celle des élites qui venaient parader au village et les villageois devenaient des spectateurs d’un développement qu’on leur apporte. Évidemment la mayonnaise ne peut pas prendre parce que ces populations ne sont pas demandeurs de ce développement qu’on leur apporte. Et même si elles sont demandeurs, les personnes qui le leur donnent ne sont pas acceptées. Donc j’essaie de créer une sorte d’harmonie entre les positions des populations résidentes et la position des élites extérieures.
Nous avons créé un concept de repas communautaires qui est quelque chose de très innovant. Nous demandons à chaque élite qu’au lieu de faire les services traiteur qui nous coûtent chers, qui ne sont pas bio, qui nous rendent malades si on a une fête au village on demande à nos mamans de faire des repas. Chaque élite demande à une maman de faire un repas spécial et en contrepartie, l’élite doit acheter un certain nombre de produits (riz, savon, huile, etc.) dont les mamans sont demandeurs au village. Lorsqu’on arrive à la chefferie, pendant que nos mamans viennent nous servir à manger, n leur donne ces produits-là à distribuer. Au moins elles savent ce qu’est le comité de développement. Quand elle aura son morceau de savon, elle dira que « c’est parce que j’étais au comité de développement que j’ai eu le morceau de savon». Avant elles se disaient : « les élites sont venues avec de grosses voitures, elles sont à la chefferie. Elles sont reparties. » C’est ce concept de repas communautaire-là que nous voulons populariser.
Le succès du congrès s’est fait ressentir également à travers les activités sportives dont l’ascension du mont Kessock. Pour quoi le Mont Kessock ?
Le Mont Kessock parce que tout simplement il est le plus haut dans les parages. C’est une montagne qui domine la ville de Dschang. Parce que si vous êtes au-dessus du Mont Kessock vous avez la ville de Dschang à vos pieds. Donc nous pensons que nous pouvons faire de ce mont-là un rendez-vous sportif annuel pour la ville de Dschang. Déjà nous avons d’autres projets pour ce mont-là. Je ne le dévoile pas encore. Mais c’est véritablement un circuit qui peut devenir sportif pour la ville de Dschang. Parce que lorsque je suis à Dschang et que je vois les gens courir sur le goudron, c’est très dangereux. Si on fait un circuit sur le Mont Kessock et que quelqu’un fait 2km de montée et de descente, c’est largement suffisant que d’aller à Balessing.
Il culmine à quelle altitude le Mont Kessock ?
Ça peut être à 1800 m ou 2000 m si on par du marigot. Je pense que c’est suffisant pour que les sportifs soient éprouvés et que ça puisse servir pour la ville de Dschang.
L’autre fait majeur c’est la participation, à travers un don d’ordinateurs, de l’ambassadeur de chine au Cameroun.
L’ambassadeur est une connaissance. Moi j’ai écrit un livre sur la Chine : « Tout chemin mène en Chine ». Ce qui fait que j’ai quand même des relations avec l’ambassade de Chine. Et à l’occasion de ce congrès j’ai contacté l’ambassadeur de Chine pour lui parler de ce que nous voulons faire. Il a donné un certain nombre de cadeaux, dont des ordinateurs, pour les enfants. Comme je dis, la Chine c’est le pays de demain. Toula Ndizong est déjà connu par l’ambassadeur de Chine, c’est un grand pas. La Chine peut devenir une opportunité pour l’Afrique, pour le Cameroun, et pour Toula Ndizong. Il faudrait que nous puissions capitaliser cela.
On est sorti de l’édition 2019 du congrès, quelles sont les perspectives pour demain ?
Les perspectives pour demain c’est que, dès qu’on est sorti de cette édition, après on prépare le congrès de 2021. Notre congrès est biennal. Justement parce que comme je l’avais dit, je ne voudrais pas qu’on fasse le congrès sans avoir fait de réalisation. Donc notre combat c’est de chercher à réaliser quelque chose. Nous avons sous la main deux projets : le projet du sanctuaire Folepe que nous sommes entrain de construire, nous avons notre route de l’émergence que nous pouvons latériter. Nous avons ce foyer culturel qui est un projet en cours, et pour lequel je disais tantôt que nous avons pu décrocher auprès du ministère de l’Agriculture et du développement rural un financement de 10 millions. En 2021 nous aurons réalisé ces projets-là ; et ce sera l’occasion d’une fête.
Propos recueillis par Augustin Roger MOMOKANA