
« Dans le 237 on fait comme ça, comme dit mon grand-frère, alors qu’on peut faire autrement ».
Le faible taux d’exécution du budget d’investissement public (BIP) dans la région de l’Ouest préoccupe. La presse ouvre le débat, les auditeurs accusent.
L’émission du réveil matinal, « Le Chant du coq », sur Crtv Ouest a mis le sujet en débat mercredi et jeudi derniers. Il s’est agi pour la station Crtv de l’Ouest de comprendre les raisons qui justifient l’inertie dans l’exécution du budget d’investissement public.
Il ressort des différentes contributions des auditeurs de cette station de radio régionale que la situation tant décriée est généralisée à l’ensemble des dix régions du Cameroun et traduit la malgouvernance qui règne en chef.
«(…) On veut plutôt donner (les marchés public, ndlr) à son frère… Et quand on donne à son frère, c’est parce qu’on sait qu’on a sa part là-dedans », s’exclame Michou, une auditrice de Mbouda.
L’objectif du thème consistait non seulement à éventrer le mal, mais à dénoncer les acteurs ou parties prenantes des projets non exécutés ou abandonnés. Ces projets sont innombrables à travers la région. Plus près de nous, dans la Menoua, l’on a l’image de cette route de Baleveng marché – Saa coupée en deux parce que les deux ponts construits depuis deux ans restent attendent les remblais pour être ouvert à la circulation des piétons et des automobilistes.
Plus loin, du Mbam-Et-Nkim, l’auditeur Victor de Linté signale un projet d’entretien routier qui date de trois ans et qui n’a jamais été exécuté. « Il y a un projet routier qui a été gagné par un très haut cadre de la république. Une élite de la localité qui a gagné un projet d’entretien routier pour une durée de trois ans. Malheureusement nous sommes au bout de la cinquième année, rien n’a été fait », explique l’auditeur.
Les populations ont beau crier, se plaindre et « écrire à la hiérarchie », rien n’est fait. En conclusion, elles s’en remettent à Dieu. S’en remettre à Dieu signifierait-il que le Pays n’a plus un chef ? Paul Biya tient encore les commandes, mais il n’écoute pas le peuple, il ne sanctionne pas. Constat : la moralisation et la rigueur dont il s’est fait le chantre ont foutu le camp, avant même d’avoir été implémentées.
« Je supplie le délégué régional des Marchés publics et le Trésorier payeur général de l’Ouest de monter à l’antenne pour nous expliquer là où se trouve le problème. Parce que, au Cameroun, la véritable difficulté c’est la rétention de l’information utile», croit pouvoir dire Honorable Menkem Sadeu de Fongo-Tongo. Convaincu de ce que ces détenteurs d’information ne se mouvront pas, une autre auditrice, Ma’a T, en l’occurrence appelle les auditeurs à s’en remettre au Seigneur : « chers auditeurs, continuons à nous égosiller. Un jour, un jour Dieu entendra nos cris ». Plus dur que Ma’a T, Prince Authentic est convaincu qu’il va falloir, pour faire les omelettes, « casser les œufs ». Pour lui il faut plutôt rétablir la peine de mort, « égorger » les coupables.
« La politique de lutte contre le sous-développement et la vie chère bat de l’aile dans la région de l’Ouest. Et pourtant l’Etat transfère, à chaque exercice budgétaire, des projets et des ressources aux collectivités territoriales décentralisées. Le taux d’exécution de ces projets n’a jamais attend 100 pour Cent à la fin de l’exercice dans notre région. Qu’est-ce qui fait problème ? Pourquoi les gens ne veulent pas consommer le budget d’investissement public ? »
Difficile dans un pays où l’incivisme a été érigé en règle de dissimuler la responsabilité de chacun et de tous. « En fait, le problème c’est nous. C’est nous les hommes qui sommes à la base. C’est nous qui sommes au firmament. Et cela rejoint cette pensée qui veut que l’Etat a deux bras : un bras long, un bras court. Le bras court sert toujours à donner, il sert à prendre ; et le bras long ne donne jamais. Comme pour dire que c’est une politique qui voudrait que parfois les gens veulent s’éterniser au pouvoir et ne voudraient pas qu’il y ait avancement dans tel ou tel autre domaine », tranche pour sa part J.P. Nongoe.
Le patriotisme a foutu le camp. Et le faible taux d’exécution du BIP est une caractéristique de la mauvaise gouvernance. « Le Chef de l’Etat, Paul Biya est bel et bien au courant de ces pratiques qui n’honorent pas notre administration. Je dis bien qu’il est au courant, puisque à mainte reprise, Mathieu Duclair, il a dénoncé l’inertie, la corruption et les détournements des deniers publics qui ont fait leur lit dans notre administration. L’administration camerounaise. Paul Biya est au courant. Malheureusement les auteurs de ces pratiques ne sont pas toujours sanctionnés, ou bien le sont tardivement. On leur donne le temps de tuer le Cameroun à petit feu ». Le Patriarche du Noun qualifie cela de « nonchalance de la gouvernance institutionnalisée » invite le président Paul Biya à sanctionner ses collaborateurs actuels pour « s’entourer de nouveaux hommes. »
Augustin Roger MOMOKANA