
Ce 8 mars, nous avons posé une seule question à une femme : « Nous sommes le 8 mars. Qu’est-ce que cette journée représente pour vous ? »
MECHIEGUI Marie n’appartient pas à la génération 8 mars. Pour la femme d’aujourd’hui elle représente plutôt une autre époque, celle révolue. Pourtant mieux que celles-là elle pose un regard objectif sur cette fête qui embarrasse y compris ses organisateurs.
« Aujourd’hui les femmes sont en fête. Je ne trouve pas aucun intérêt à m’associer à cette fête. Au début, beaucoup de femmes ont perdu leur foyer à cause de la Journée Internationale de la femme. D’autres sont devenues des infirmes, sans ignorer que les plus chanceuses ont été pardonnées pour leurs déviances. Peut-être que si j’avais été plus jeune, je verrai la chose autrement.
Tu sais, le 8 mars c’est une fête. Et la fête signifie manger, boire, danser et déconner même. La femme dit qu’elle veut être l’égal de l’homme ? C’est quel mauvais rêve ? Je ne vois pas en quoi je pouvais me mêler à ce genre de manifestation. Je suis cultivatrice, et souvent j’étais occupé à faire mon champ lorsque je voyais certaines femmes aller à la fête. Ça ne me disait absolument rien.
Ecoute-moi bien ! Je ne suis pas contre la journée de la femme. Mais ce que je ne comprends pas c’est l’objet et même comment les femmes fêtent. Dieu a créé son monde comme nous le connaissons et des individus pensent pouvoir le transformer à leur guise. Bien sûr que la femme est aujourd’hui capable de faire tout ce que l’homme.
Une femme intelligente ne s’accroche pas à ce genre de divertissement. Elle sait que son défi c’est d’envoyer ses enfants à l’école. Elle sait que son défi personnel c’est de travailler dur pour s’épanouir. Si elle est épanouie, elle comprend mieux les enjeux de sa société. Et Si ses enfants font de bonnes études elles auront une considération auprès de leur mari et de la société. Tu vois docteur Kana Marie ? Elle est aujourd’hui un grand professeur pour quoi ? Parce qu’elle a compris que l’école est bien et que si elle travaille bien elle aura la récompense. Ce que ses parents et son mari ont fait c’était de l’encourager dans cette voie-là. Quand on parle d’égalité, il ne s’agit pas d’égalité dans le couple, mais d’égalité au travail. Je veux dire que le mari doit demeurer le mari et la femme sa femme. Certains interprètent mal cette notion d’égalité que les blancs veulent nous imposer pour détruire nos traditions. Pour eux, égalité signifie que l’homme peut devenir la femme et vice-versa, comme cela se voit dans le cinéma. Nous ne devons pas accepter que notre monde marche sur la tête.
Notre société d’aujourd’hui est tellement bien organisée que la femme peut devenir ce qu’elle veut, à condition qu’elle démontre qu’elle a des aptitudes, la capacité et la compétence nécessaires. On voit la femme conduire les avions. On voit la femme opérer les gens dans les hôpitaux, on voit la femme diriger des chantiers de construction des maisons, on voit la femme dépanner les voitures et les préparer la nourriture du servir dans les grandes cérémonies. Certains pays ont même la femme à leur tête. Un jour nous allions à Babadjou, la route de Mbouda-Bamenda était en chantier. J’ai aperçu une femme parmi les hommes. C’est comme si c’est elle qui commandait. L’enfant de la petite sœur de mon ami Matio est commissaire de police. Sais-tu que certaines femmes ont payé l’impôt à leurs maris ? J’en connais. Sais-tu que ce sont certaines femmes qui donnent de l’argent à leurs maris pour payer la scolarité de leurs enfants ? Je te prends comme ça quelques cas dont j’ai été témoin.
Alors, ce que la femme doit savoir c’est qu’elle doit être courageuse, déterminée pour être capable d’exercer tous les métiers que l’homme jadis réservés à l’homme. Pour cela elle doit aller à l’école. Je ne connais pas un parent qui, aujourd’hui, peut dire que parce que cet enfant est une fille elle ne doit pas aller à l’école. L’égalité est réelle entre le garçon et la fille. Mais si c’est pour dire que la femme doit se mesurer à l’homme, je pense que nous serions entrain de faire une erreur grave.
Je conseille souvent à mes femmes de ne pas perdre leur crédibilité à cause du 8 mars. Et cela est le vœu que je peux émettre pour toutes les femmes qui s’engagent dans cette fête. Elles doivent la vivre avec responsabilité et dignité. Elles doivent plutôt savoir que le plus important pour elles c’est de montrer à leurs filles que l’école est une opportunité extraordinaire que la société leur offre pour s’accomplir socialement et professionnellement. Puisque cette époque n’est plus la nôtre, nous disons à nos enfants que leur premier mari c’est leur travail. »
MECHIEGUI Marie