Les gens font même quoi avec l’argent du Cameroun ? Un centre de santé intégré (CSI) abandonné à un personnel dont la vie peut s’arrêter à tout moment suite à l’affaissement de la structure ! Pourtant, réfectionner ce centre lui permettrait de remplir ses missions régaliennes en matière de procuration des soins de santé à une population de plus de 20 000 patients.
Le CSI de Fometa a été créé dans les années 1990, alors que Docteur Pierre Marie METANGMO était le chef de district de santé de Dschang. À l’époque, la population croyait que c’était l’hôpital de Maitre Nomeny. Non seulement il se trouve à Keleng, mais surtout sur un terrain que cet ancien magistrat reconverti huissier de justice a mis à la disposition de l’Etat.
« Le don de la Fondation MOJE vient à point nommé. Parce que qui dit moustiquaire dit bye bye au paludisme. Il permet de renforcer la guerre que nous menons contre le paludisme depuis des années. Les mamans, les enfants de moins de 5 ans n’auront jamais marre de recevoir ces moustiquaires. »
Le CSI de Fometa que Sinotables découvre à l’occasion de la distribution des moustiquaires imprégnés aux femmes enceintes, aux enfants de moins de 5ans, par la Fondation MOJE dont le siège est à Bafoussam, est aujourd’hui une formation sanitaire à l’abandon. Cela ne voudrait pas dire qu’il est dans la broussaille ou fermé. Non ! Il est là comme un migrant abandonné au cœur désert.
Comment reconnait-on un CSI à l’abandon ? De l’expérience du CSI de Fometa, voici les caractéristiques d’un centre de santé abandonné :
La première caractéristique c’est l’état du bâtiment. Les murs sont bossus et fissurés, pendant que vous y êtes il s’émiette et des gravats peuvent échouer sur vous. Lorsque vous entrez dans ce qui tient lieu de toilette, le sol vibre. Vous avez eu la chance qu’il ne vous avale pas cette fois.
La deuxième caractéristique, c’est que le personnel est le plus chaleureux du monde. Vous n’y comprenez rien et vous comprendre pourquoi cette joie de « retrouvailles » pour des personnes qui ne vous connaissant pas ? C’est alors que les confidences du voisinage révèlent que votre présence brise l’isolement dans lequel ce personnel est astreint. Les gens ne fréquentent plus ce centre de santé. « Vous-même viendriez dans un hôpital qui ne peut pas vous donner ne serait-ce que le paracétamol ? Non seulement cela, cet hôpital met votre vie en danger.»
La troisième caractéristique c’est effectivement la désertion de cet hôpital par les populations de cette aire de santé qui totalise une population de 21000 personnes. Cela peut paraitre curieux de savoir pourquoi un centre de santé dont l’aire de santé abrite l’université de Dschang, l’institut supérieur des sciences et technologies Nanfah, l’Institut supérieur Foyaguem, le CENAJES de Dschang vit dans l’abandon malgré la promiscuité des mini-cités dans son périmètre. Où est-ce que ces populations de soignent-ils ? Laisser un CSI devant sa porte pour aller faire le rang à l’hôpital régional annexe ou dans les formations privés …
Deux révélations nous ont été faites par l’infirmier-chef du CSI de Fometa himself. La première révélation c’est que le centre emploie sept personnels dont six infirmiers pris en charge par la mairie de Dschang. Ce n’est donc pas le personnel qui manque à cette formation sanitaire. Peut-être que ces techniciens devraient être redéployés ailleurs ? La deuxième révélation c’est le diagnostic présenté par la maitresse des lieux. Il s’agit d’une situation incroyable. Aucun microscope, pas de tensiomètre, pas de glucomètre, pharmacie vide, etc.
« La formation sanitaire ne dispose pas de matériels que ce soit au laboratoire, que ce soit en salle d’accouchement, que ce soit en vaccination. Nous n’avons aucun appareil à notre disposition, même pas le simple microscope. N’en parlons pas d’un hémoglobulomètre. Les réactifs de laboratoire, n’existent pas. Les tests de labo non plus. Pire aucun médicaments. On a beau sensibiliser les populations, mais aucun patient ne vient quand il sait qu’il ne pourra pas recevoir ne serait-ce que le paracétamol. Quand j’ai été nommée chef de l’aire de santé de Fometa, j’ai découvert la situation et, avec l’appui du chef du district de santé, j’ai entrepris de sensibiliser les populations. Je suis allé voir les chefs traditionnels afin qu’ils parlent aux populations. Non seulement la marie prend en charge six personnels, mais elle a fait un don de lits », explique KELIFACK Anita Edith, cheffe de l’aire de santé de Fometa.
L’hôpital que Sinotables présente figure dans le top cinq des grosses aires de santé du district de santé de Dschang, derrière Fialah Foréké-Dschang, Baleveng et Doumbouo. Ce sont des aires de santé sur qui tous les regards sont braqués lorsqu’il est question de santé publique dans le district de Dschang qui couvre les communes de Dschang, de Fokoué, de Fongo-Tongo et de Nkong-Zem. L’aire de santé de Fometa située dans une zone semi-urbaine couvre 17 communautés.
Pour le bienfaiteur, la Fondation MOJE, le don en moustiquaire tient d’un constat fait au cours d’une campagne ophtalmologique, grande spécialité de cette fondation. Il avait constaté non seulement l’état de vétusté du centre, ce qui n’offre aucune opportunité d’accueil. Les moustiquaires ont été distribués, les bénéficiaires ont en même temps reçu démonstration sur son installation ainsi qu’un sensibilisation sur la prévention du paludisme. Cette dernière passe non seulement par un environnement propre, mais aussi par le savoir enfiler son moustiquaire.
Augustin Roger MOMOKANA