
Vous êtes jaloux des bamiléké parce que vous êtes incapables de les imiter pour devenir grands, n’est-ce pas? Pourtant vous êtes sans ignorer qu’il n’y a point de honte à copier le bon exemple. Prenons le cas des funérailles.
Cet article a été rédigé par Augustin Roger MOMOKANA pour le compte du journal en ligne Sinotables. Date de la mise en ligne 24 Novembre 2021.
Quand ont dit funérailles, certains disent que c’est pour gaspiller de l’argent. Ils mentent. C’est parce qu’ils ne connaissent pas les bamiléké. Le Bamiléké ne jette pas son argent par la fenêtre. L’impression de gaspillage est due au fait que les bamiléké n’ont jamais renoncé à la vie en communauté, à la solidarité africaine.
Je ne veux pas faire un discours sur les funérailles. Je veux tout simplement inviter ceux qui se moquent et médisent des bamiléké de contempler la photo qui illustre cet article. Il s’agit de l’une de nombreuses manières dont dispose le Bamiléké pour rendre hommage à ses défunts. Ce n’est pas une question d’argent, mais de volonté.
Ici nous sommes à Fonakeukeu, un village du groupement Foto, à 5 kilomètres du centre-ville de Dschang. En plein pays bamiléké. Là où les gens demeurent attachés à leurs ancêtres, à leurs us et coutumes, malgré l’impact très visible de la religion occidentale.
Pour les funérailles de son père, Choufo NGUEFACK Paul a fait ériger un monument à l’entrée de la maison familiale. C’est sa façon à lui de dire merci à papa TADJOUMO Jean pour tout le bien qu’il lui a fait. Non seulement il lui a donné la vie, mais aussi il a œuvré pour qu’il grandisse, ait une femme et devienne à son tour un chef de famille respectable.
Ce monument construit en hommage à papa a transformé la physionomie du coin. Cette place devient une attraction dans le village pour le village comme pour les étrangers de passage dans le village. Samedi, les gens se sont bousculés pour se faire tailler un souvenir par un photographe. On a dû prendre la « chicote » pour que la foule qui l’avait envahie se disperse afin de permettre le bon déroulement des cérémonies.
Ce que les enfants de papa TADJOUMO Jean ont fait, c’est un peu ce que les populations attendent que les mairies offrent à leur cité. Ils doivent ériger des sculptures monumentales dans certains endroits de nos villes. Il ne s’agit pas forcément des figures historiques (le consensus au conseil municipal est difficile à obtenir) ou humaines, mais des monuments qui peuvent appeler à la méditation, créer une complicité entre le citoyen et la ville.
Il y a d’autres façons de rendre hommage à son défunt. Certains construisent des tombes colossales, d’autres réhabilitent la maison familiale, d’autres offrent un service public – point d’eau, aménagement de la route d’accès, etc. à la communauté du défunt, d’autres donnent à manger et à boire à la communauté.
Mais on n’organise pas des funérailles pour manger l’argent. On organise les funérailles pour montrer aux amis et au monde entier l’amour que l’on a de nos défunts. On organise les funérailles pour rendre grâce à Dieu de nous avoir fait naitre par cette personne aujourd’hui défunte.
Nous pouvons manifester cet amour de plusieurs manières. Par le niveau de réalisations dans la perspective de l’événement, par la capacité de réception des hôtes, par la capacité aussi de faire table rase sur tous les conflits qui déchiraient la famille. Beaucoup de gens disent que les bamiléké organisent les funérailles pour faire étalage de leurs capacités financières. C’est faux!
Les bamiléké organisent les funérailles comme un rituel obligatoire. Il l’est parce que si vous aimez votre défunt, vous devez le faire passer du stade de défunt à celui d’ancêtre. Si vous le laissez trainer parmi les vivants, vous serez victimes de la malédiction. Si par contre vous le célébrez, vous serez sous sa protection car, sans vous consulter, il va intercéder auprès de Dieu afin que ce dernier exauce vos prières.
Ne voyez plus les bamiléké comme des insensés, mettez-vous plutôt à leur école et vous connaitrez le bonheur éternel.
Augustin Roger MOMOKANA