
Qu’ils soient journalistes ou photojournalistes, il est évident que ces acteurs des médias doivent s’interroger des rapports du réel et de l’imaginaire dans leur exercice de la profession.
Cette préoccupation est commandée par la percée des intelligences artificielles génératives dont la dernière image en date demeure la « fameuse image du pape en doudoune ». Imaginez-vous un pape surpris entrain devant le prêtre, entrain de consacrer son union ?
En effet, des logiciels tels Dall-E, Midjourney, ChatGPT permettent aujourd’hui de créer des images et des textes de synthèses sans recourir nécessairement aux banques d’images ou à une bibliothèque. Cette percée technologique certes est une menace pour le métier, mais elle pose davantage le problème de la réalité des faits rapportés.
Dans un entretien accordé à Heidi.News, le photojournaliste Niels Ackermann qui est le co-fondateur de l’agence Lundi13, invite ses confrères à s’intéresser à cette technologie, à leurs utilisations, en accroissant leur capital de confiance pour le registre du réel, du vrai. C’est en tout cas le défi commun face à une technologie de synthèse qui ne se donne aucunes limites dans son extravagance.
Ne pas explorer à l’Intelligence Artificiel serait une erreur pour le photojournaliste et le journaliste. Parce que cette technologie peut lui permettre, raisonnablement, d’améliorer la qualité ses images et de ses textes, tout en restant dans le vrai. Quelle est la perception du lecteur ou du public devant une série d’images montrant la captivité et l’emprisonnement de Donald Trump ?
« (…) les lecteurs ont toujours vu les photos publiées dans la presse comme une forme de rapport au réel. Les montages, qui ne datent pas des IA génératives, ont toujours été vécus comme une tromperie. Il ne doit pas en être différemment avec ces logiciels », explique Niels Ackermann.
Evidemment, l’intérêt pour les acteurs actuels est de préserver le champ du réel, afin que leurs successeurs ne doutent pas de leur sincérité professionnelle. Parce que l’enjeu de l’explosion des technologies génératives est avant tout financière et non l’authenticité.
Les dérives d’une telle technologie sont explosives, le témoigne la fameuse série d’images du pape en posture de marié. Elle suggère de questionner le rapport de l’authenticité et de l’intérêt avec l’impact social. La « dimension fictive » de ces images n’est pas perceptible pour tous les contemplateurs. Il y en a dont le jugement se limite de l’extase de la beauté, tout comme il y en a qui se limite à questionner la prouesse qui a conduit à un tel résultat.
Pour cela, Niels Ackermann soutient qu’il doit y avoir « une distinction claire entre ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas dans les médias. » dans tous les cas, les intelligences artificielles génératives ne sont après tout que de simples outils aux mains des professionnels.
Augustin Roger MOMOKANA Photo : Pôle Emploi