
La Chronique de Kemadjou Njanke Marcel
Dschang, 07 juin (Sinotables.com) – Dans toutes les civilisations africaines anciennes ou récentes l’habitude de porter des couronnes creuses, réceptacles de la vie intégrale est très visible. C’est le souvenir du temps où les royautés étaient solaires.
En ces temps-là le roi était d’abord un ritualiste du soleil avant d’être un homme d’Etat car c’est de la puissance solaire qu’il tirait sa force et les vertus utiles qu’il mettait en mouvement pour recréer le paradis sur la terre. On voit donc que c’est le vaticanisme (qu’on a tendance à confondre avec le véritable christianisme), qui est à l’origine de la séparation du ciel et de la terre et de l’invention du péché dans le but d’embrigader les peureux et les faibles.
Le Sphinx de l’Egypte avant les sables et les peuples qui ont continué le travail par la suite, lorsque le désert avait fini de ronger la forêt tropicale, construisant ces centaines de montagnes qu’on a appelé pyramides sont aussi des souvenirs de cette époque glorieuse.
Ces couronnes creuses qu’on appelle en Medumba Makwa atteignaient parfois jusqu’à vingt kilogrammes et avaient pour but de rappeler au roi qu’il est le garant de l’équilibre social, le serviteur du soleil qui donne sans cesse sans se soucier de la bonté ou de la méchanceté des uns et des autres.
Etre roi voulait donc dire porter sur sa tête non seulement le soleil mais aussi de lourdes responsabilités rituelles, philosophiques, politiques, économiques, militaires et sociales.
C’est de ces époques très lointaines qu’est née cette sagesse qui est attribuée au prophète Jésus sous cette forme : « ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux. »
On trouve encore dans la langue Medumba des Bangangté de l’Ouest Cameroun une expression héritée de cette période : ceux qui sont capables d’ôter le soleil du ciel. Ceux-là étaient tous des maîtres du jour qui travaillaient en étroite collaboration avec le roi, ritualiste en chef.
Ce mode de gouvernement a eu ses années de gloire pas seulement en Egypte mais aussi en Inde, au Tibet, en Amérique latine… Les derniers vestiges de cette royauté qui avaient pris la forme du culte du feu sont personnalisés par le Roi inventeur Njoya et, le Roi Kuika Tchamba de Bangoulap qui, constamment calomnié et emprisonné, n’a pas eu le temps de réaliser tous les aspects de sa stature intérieure lumineuse.
Ces deux rois ont été des rayons de lumières apparus à une époque où on était déjà passé à la royauté lunaire ; cette royauté changeante qui nage entre intérêts personnels et intérêts collectifs et qui parfois ne s’abstient pas de sacrifier le bonheur du peuple quand la multiplication de ses propres richesses est en danger.
Aujourd’hui les gouvernements qui ont remplacé les royaumes sont tous lunaires car ne visant que la satisfaction des appétits des magnats de la finance qui placent qui ils veulent au pouvoir sous prétexte de démocratie. Cette civilisation cruelle et vantarde qui ne cache pas son ingratitude vis-à-vis du passé communique beaucoup pour faire croire qu’elle a fait mieux que les civilisations englouties, en ce qui concerne l’amélioration du niveau de vie. Pourtant, elle a affiné l’idée d’asservissement à un point si dangereux que l’esclavage est passé de physique à mental. Ce type de gouvernement basé sur l’égoïsme et la cupidité a coupé les liens directs qui unissaient le soleil généreux aux êtres humains.
Au début du XXème siècle, les sociétés secrètes qui étaient restées intègres comme certains Ku’nga par exemple avaient choisi de quitter les cours royales pour ne pas créer des électrochocs capables de tuer certains dignitaires ayant violé des règles de la morale solaire. Cependant, trois pays de ce siècle sont en train de reprendre la courbe ascendante solaire, la Chine sur le plan économique, la Russie sur le plan militaire et l’Inde sur le plan spirituel. En attendant qu’ils réorientent complètement les mentalités vers le sens du bien commun dans 30 ans, reprenons ce couplet que les danseurs de Kessou ou de Ndanji reprennent régulièrement à Bangoulap : « Mfǝn yαg mαnŋwʉ : / Bαg bǝ nsa mi » qui signifie « Notre roi est la lune : / Nous sommes les étoiles. »
KEMADJOU NJANKE Marcel