Non seulement le Sous-préfet de l’arrondissement de Dschang, MBELLA EDJENGUELE Max, a pris une décision portant interdiction des « cérémonies coutumières projetées à la Chefferie Supérieure Fotetsa du 18 au 27 janvier 2024 ; relatives à la sortie du La’akem du Sieur ATONFACK Paul II Daniel », mais le préfet du département de la Menoua, ITOE Peter MBONGO, a présidé une réunion de mise au point et de mise en garde contre toute velléité de rébellion.
« – Manifestation publique non déclarée et Absence d’autorisation préalable. – Risque d’affrontements populaires avec menaces de troubles graves à l’Ordre Public. – Dénonciation par les populations du Groupement Fotetsa de l’organisation et de la tenue desdites cérémonies. »
La réunion de ce mercredi 17 janvier 2024 en la salle des conférences de la préfecture de Dschang a réuni autour du préfet du département de la Menoua et du sous-préfet de l’arrondissement de Dschang, les chefs des forces du maintien de l’ordre (commandant de la compagnie de gendarmerie de la Menoua, le commissaire central, le commissaire spécial, la ST et la SEMIL), le chef supérieur du groupement Fossong Wentcheng, Sa Majesté NGUEFACK Placide, des notables et des princes du groupement Fotetsa.
Après un bref exposé du préfet sur la genèse de la crise de succession à la chefferie supérieure Fotetsa, la parole a été donnée Sa Majesté NGUEFACK Placide pour présenter les cas de figure dans la désignation du successeur d’un chef traditionnel dans l’espace yemba.
De l’exposé de chefs supérieur des Fossong Wentcheng l’on a retenu que la désignation du successeur se fait sur la base du testament du défunt chef. Dans ce cas, les notables prennent acte et entérine la dernière volonté du défunt. Dans le cas où le défunt n’a pas laissé un testament écrit- tel est le cas de Sa Majesté DJOUATSA II Pierre Marivau, l’on reçoit le testament verbal s’il existe. S’il n’existe pas, alors les notables et les princes sont appelés à se concerter avec les ancêtres pour désigner le successeur du défunt chef.
« Le Monsieur s’est présenté, il a raconté tout ce qu’il a raconté. Vous, Monsieur le préfet, vous nous avez demandé : « est-ce que vous accepté ces paroles ? » C’est le chef Fossong Wentcheng qui a accepté à notre place. Ensuite nous tous, les notables, nous avons dit « oui ». C’est quand nous sommes arrivés dans la cour qu’il y a eu contestation.»
Le préfet du département de la Menoua, le sous-préfet de l’arrondissement de Dschang, le chef supérieur Bafou en sa qualité de parrain du groupement Fotetsa, et le chef supérieur Fossong Wentcheng ont pris part aux consultations des notables : les 9 et 7. Au cours de ladite consultation, il s’est avéré que le défunt chef n’a pas laissé de testament écrit. C’est alors qu’un monsieur se présente comme étant un ami du défunt. Il n’est même pas un Fotetsa. Il est porteur de la dernière volonté de Sa Majesté DJOUATSA II Pierre Marivau. Elle est orale. La parole lui est donnée pour qu’il dévoile le secret.
Lorsqu’il a fini, il lui est demandé de jurer que le message qu’il vient de dévoiler est juste et fidèle. Le défunt ne lui a pas confié trois personnalités (Fô, Asa’a et Mèffo) comme cela est de coutume. Il ne va pas le faire n’importe comment, mais selon les us et coutumes reconnus par les chefs supérieurs présents. Ainsi tous les notables se décoiffent et l’ami du chef défunt crache dans leur chapeau. Il s’agit d’un cadi qui signifie que s’il a menti, ses jours seront abrégés par les ancêtres Fotetsa.
« Vous avez fait cette cérémonie devant moi. Vous avez confirmé un nom devant l’autorité administrative. J’ai pris le nom et je suis parti. Vous êtes restés consulter les ancêtres… Je n’étais plus là. J’avais déjà le nom de votre nouveau chef supérieur.»
Sur la base de ce témoignage non contesté de l’ami du défunt chef, un procès-verbal est rédigé par le sous-préfet MBELLA EDJENGUELE Max dans lequel ATEMKENG NANDJOU Clément Miguel est identifié comme étant le successeur du défunt chef de Fotetsa. Le document est relu et les notables présents y apposent leurs signatures. Le préfet regagne alors sa place à la tribune officielle et attend que l’arrestation du successeur suive. Sauf que plus d’une heure va s’écouler sans que les notables regagnent l’esplanade du palais royal où se déroule la cérémonie.
Selon nos sources, le temps mort tient de ce que le défunt chef aurait précisé que les notables ne touchent pas à son successeur. Majesté AFOUPAPU Jean, doyen des notables est d’ailleurs expulsé de la concertation conformément à la volonté du défunt. Pourquoi ? Aucune explication ! Mais des sources contradictoires expliquent cela par les relations tendues entre le défunt et certains de ses notables. Cette autre révélation contribue à diviser les notables. Certains vont quitter la case secrète pour regagner la cour. La tension commence à être perceptible sur des visages. Mais cela ne va pas empêcher que le premier notable conduise le chef supérieur Bafou, Fodong KANA III Victor, devant le jeune ATEMKENG NANDJOU Clément Miguel. Le roi des Bafou assisté de l’un de ses notables (Moho Zoho) se saisit de l’enfant et le notable l’enfant est conduit au lefem.
« Quand on montait dans la cour il n’y avait que deux personnes qui connaissaient le successeur : le président TCHOUFACK et le testamentaire. Personne d’autre ne connaissait le nom de l’enfant. Je ne sais pas à quel moment j’ai influencé.»
La contestation proclame son règne. La cour royale est envahie par des princes révoltés. Les uns sont mécontents parce que l’enfant arrêté « n’est pas le fils du chef », d’autres parce que « sa maman n’est pas de Fotetsa », « il ne peut pas avoir désigné le fils de cette femme qui l’a beaucoup maltraité », « le mouton n’a pas bêlé pour augurer ce qui allait suivre », etc. Chacun y va de son argument. Dans ce brouhaha, une partie des princes est calme et observe, d’autres quittent la cour.
Dans les tribunes, les autorités et les invités sont surpris par la tournure que prend l’événement. Ainsi, lorsque le prince arrêté est présenté au préfet du département de la Menoua, ce dernier dira en substance : « Comme vous le savez, et le président du comité d’organisation l’a dit, nous sommes dans une cérémonie purement traditionnelle. Nous sommes là pour constater et prendre acte de ce que les garants de la tradition de ce groupement ont prévu», a-t-il déclaré
« Il y a eu contestation devant vous de sorte que les chefs sont partis son manger, c’est là que les frères du défunt ont dit ‘’Qu’est-ce que vous avez fait comme ça, sans nous consulter et sans nous dire ? Nous avons le successeur de notre père. Ce que vous avez fait n’est pas normal. Ce n’est pas ça’’. C’est alors que nous rentrons dans le lieu sacré du village, et nous savons que le chef a été perturbé dans la coutume il y a de cela 10 ans. Raison pour laquelle il refuse aux 9 notables de toucher à cet héritier.»
Après la cérémonie du 1er février 2023 consacrée aux obsèques du défunt chef de 2e degré du groupement Fotetsa et à l’arrestation de son successeur, un groupe de notables a opéré la volte-face, s’est joint aux princes contestataires. Et comme conséquence, le 22 février 2023, ils ont procédé nuitamment à l’arrestation du prince ATONFACK Paul II Daniel comme successeur du défunt Sa Majesté DJOUATSA II Pierre Marivau. Cela en dépit de l’interdiction de toute manifestation dans l’enceinte du palais royal.
Lors de la séance de travail de ce mercredi, le préfet de la Menoua a dit ne pas être contre les contestations, sauf qu’elles ne doivent pas viser à défier l’autorité de l’Etat qui a prévu des voies de recours. Ainsi, les notables qui se sont retournés de costumes sont ceux qui ont validé la désignation de ATEMKENG NANDJOU Clément Miguel. S’ils avaient demandé au préfet de suspendre la cérémonie du 1er février afin de leur permettre de consulter les ancêtres, ils auraient été écoutés et leur doléance exécutée. Pour exprimer leur opposition, ils doivent écrire même au ministre de l’administration territoriale ou saisir l’autorité judiciaire.
Augustin Roger MOMOKANA