Pour la promotion des énergies renouvelables et la lutte contre les changements climatiques au Cameroun les différents acteurs viennent de se mettre en plateforme sous la dénomination C4PER (Cadre de concertation sur les changements climatiques pour la promotion des énergies renouvelables). A l’initiative de la Fondation Friedrich Ebert.
L’atelier de deux jours, les 10 et 11 avril 2018 à l’Hotel de Malte à Dschang, a accouché d’une charte et d’un plan d’action; Monsieur Eric Ngueguim a été, par ailleurs, plébiscité pour assurer la coordination générale du C4PER.
Dites à nos lecteurs, qui est Eric Ngueguim ?
Je suis Eric Ngueguim. Coordonnateur général de la plateforme C4PER qui vient d’être mise en place. C’est une plateforme pour la promotion des énergies renouvelables et la lutte contre les changements climatiques. Donc cet atelier a permis d’adopter une charte pour la mise en place de cette plateforme qui va permettre aux maires, aux collectivités de pouvoir mieux organiser les projets d’énergies renouvelables et la lutte contre les changements climatiques dans leur commune.
Comment avez-vous accueilli la proposition de votre candidature et surtout son plébiscite par les membres présents ?
Oui ! J’ai été choisi à l’unanimité, à l’issue de la réunion, par les membres présents. Je ne m’attendais pas à cela. Quand je suis venu ici à Dschang, j’étais un acteur invité et avec sa grande sagesse l’assistance a trouvé que je pouvais la représenter dans ce grand travail qui va permettre au Cameroun de pouvoir développer et faire la promotion des énergies renouvelables et lutter contre les changements climatiques. Ce qui s’inscrit en droite ligne de la volonté du président de la République à travers la COP 21 ; le Sommet de Paris où le président était présent et où le Cameroun a ratifié l’Accord de Paris pour lutter contre les changements climatiques et développer les énergies renouvelables.
Les maires sont très impliqués dans ce processus parce que les magistrats municipaux sont ceux qui font bénéficier directement les projets aux citoyens.
A quand remonte le début du processus qui aboutit aujourd’hui à la mise en place de la plateforme C4PER ?
Je n’ai pas été au début du processus quand les ateliers ont commencés pour la mise en place de cette plateforme. J’ai pris le train en route, je me suis intégré et ça me fait vraiment chaud au cœur et je suis très ému par la grande confiance que les uns et les autres m’ont accordée sans m’avoir consulté au préalable.
En passant, quel message à ces acteurs qui ont porté leur choix sur votre personne ?
Je suis très ému par la grande confiance que vous m’avez accordée. Et je vous promets que je vais travailler sincèrement et essayer de vous rendre également la même confiance. Je vais surtout plaider pour l’équipe avec laquelle je vais travailler. Parce que vous qu’on ne peut pas réussir seul. C’est avec l’équipe que je vais coopter que nous allons réussir. A moi tout seul je ne peux rien faire. Je vais particulièrement remercier madame le maire d’Angossas. Partout où il y a des femmes, elles adoucissent les choses.
Quel est l’enjeu majeur de cette initiative pour l’avenir des énergies renouvelables au Cameroun ?
Effectivement, la mise en place de la plateforme C4PER dont je suis le coordonnateur est une grande réussite et une première au Cameroun. Simplement parce que pour une fois les maires sauront à qui s’adresser s’ils ont des questions, des questionnements sur la mise en œuvre théorique ou pratique des projets d’énergies renouvelables sur leur territoire. Ce qui va permettre la pérennité des projets. Ça va permettre aux projets d’être beaucoup plus longs. Parce qu’on va leur apporter une assistance juridique, une assistance politique et même une assistance technique sur le terrain. Aujourd’hui, la question des énergies renouvelables se pose au Cameroun. Tout le monde a envie de les réaliser, les maires ont envie de les réaliser. Maintenant, la qualité des projets est très importante et pour que l’on ait des projets durables. Il ne faut plus qu’on réalise des projets aujourd’hui et qu’ils cessent de fonctionner demain. Ça décourage les populations, ça décrédibilise le maire qui au fond veut bien faire. Donc, avoir une plateforme comme le C4PER où les maires peuvent poser leurs interrogations, poser leurs questions, où ils peuvent remonter leurs besoins et en retour nous leur apportons des solutions à partir de nos différentes expériences, parce que la plateforme est multiforme- on a des gens de différents domaines : nous avons des universitaires, nous avons des gens des sciences appliquées, nous avons des gens de terrain- est une véritable révolution ; et toutes ces forces vives qu’on essaie de conjuguer nous permettent effectivement de transmettre aux maires une certaine compétence qui va permettre aux projets de durer et de bénéficier aux populations pendant longtemps.
En deux jours l’atelier a abordé plusieurs thèmes et effectué une descente sur le terrain. Mais il est revenu dans tous les débats que la politique nationale en matière des énergies et des énergies renouvelables n’est pas cohérente. Comment est-ce que la plateforme va-t-elle influer cette politique-là ?
La loi camerounaise c’est celle de 2011. C’est une loi qui est déjà très bien parce que le gouvernement a essayé de faire des avancées ; mais elle est insuffisante. Avec la plateforme on va essayer de faire des propositions. Parce que nous sommes des hommes de terrains. Avec des projets on voit ce qui ne va pas. On va essayer de rassembler un certain nombre de propositions qu’on va les porter humblement aux pouvoirs publics pour essayer de faire avancer la loi. Le gouvernement est conscient que la loi doit évoluer, mais le problème c’est qu’il y a un retard qui dure et dure encore. Les besoins sur le terrain se font de plus en plus. Donc accélérons ce processus pour dire à l’Etat « Attention ! Allons-y vite ! Parce que les besoins y sont et comme ça prend du temps ça empêche le développement ». Aujourd’hui, les besoins sur le terrain se font de plus en plus ressentir et nous sommes-là pour essayer d’accélérer les choses et permettre aux populations de bénéficier de tout ce qui peut être développement, épanouissement dans le domaine des énergies renouvelables.
Quelle lecture faites-vous de l’approche de Dschang pour résoudre le problème d’énergie dans sa zone rurale, vous avez visité ce matin la mini centrale hydro électrique de Tchouadeng/Megueu ?
J’ai visité la centrale de Tchouadeng et c’était une très belle expérience, un très beau projet, une très belle réalisation. Et je suis d’ailleurs très content, avec madame le maire de la Commune d’Angossas qui a aussi visité cela. Dschang est un exemple à suivre. Parce que dans les questions d’énergies renouvelables, comme on le voit dans la loi camerounaise, le Cameroun préconise ce qu’on appelle l’autoconsommation ; et Dschang est un exemple pour l’autoconsommation, c’est-à-dire essayer de faire des projets d’énergies renouvelables de manière décentralisée pour essayer de subvenir aux besoins des populations. Donc pour moi, la centrale de Tchouadeng que j’ai visitée est un excellent projet, c’est un exemple à suivre. On peut ne pas faire le même projet partout, parce que Dschang a un potentiel hydroélectrique et d’autres communes auront d’autres potentiels ; mais on peut faire exactement la même démarche pour essayer d’autonomiser la production électrique dans les différentes communes en vue de satisfaire les attentes des populations.
Vous êtes si optimiste que je vous demande de me dire avec quels moyens vous vous engagez !
Je suis très optimiste parce que le capital essentiel pour réussir quelque chose c’est d’abord le capital humain. Et aujourd’hui nous avons ce capital humain. Ça fait deux jours que nous sommes à Dschang pour essayer de nous mettre d’accord sur ce projet. Ça veut dire qu’il y a déjà la volonté. Et lorsqu’il y’a la volonté, pour moi, tous les autres moyens doivent suivre. Si on a les moyens sans volonté, on n’y arrive pas. Nous avons la volonté, nous avons eu le capital le plus difficile qui est le capital humain et aujourd’hui nous sommes d’accord pour avancer. Parce qu’on a cette entente.
Les gens parlent tantôt des énergies propres tantôt des énergies renouvelables. C’est quoi la différence ?
Une énergie propre est une énergie décarbonnée. On prend le cas du nucléaire. Alors qu’une source d’énergie renouvelable est une énergie dont la source se renouvelle. En réalité, une énergie n’est pas renouvelable, mais c’est la source d’énergie qui est renouvelable. Les gens par abus de langage disent énergies renouvelables, en réalité c’est la source de l’énergie qui est renouvelable. Une source d’énergie renouvelable est une source d’énergie qui se régénère rapidement.
Comment le Syndicat des énergies renouvelables du Cameroun dont vous êtes le président va-t-il accompagner le C4PER ?
Effectivement le C4PER est une plateforme multiforme où il y a différents acteurs qui peuvent venir de différentes obédiences de la société. Le syndicat est un acteur aussi du C4PER. Donc le syndicat n’est pas contradictoire. Comme nous prenons tous les acteurs dans les différents secteurs : le secteur public, le secteur privé, et même parfois le secteur informel. L’expérience du syndicat des énergies renouvelables du Cameroun dont je suis le président sera également apportée dans la plateforme C4PER pour permettre à plusieurs personnes de profiter de cette expérience.
Lorsque nous parlons des énergies renouvelables, il y a en amont des caractérisations qu’il faille faire. Dans ce registre-là, que dites-vous aux maires ?
En tant qu’expert le conseil que je donne aux maires c’est qu’un projet se réussit en amont. On gagne pour réaliser un projet dès le départ sur l’analyse des besoins, le choix des équipements, le respect de la norme. Là on a un bon projet. Si on a mal défini les paramètres d’un projet, on ne peut pas le réussir ; même si on donne toute l’énergie nécessaire. Il y a, par exemple, le choix de la qualité des panneaux solaires. Il existe plusieurs sortes de panneaux solaires. Je prends le cas de Dschang où l’ensoleillement n’est pas le même qu’au nord du Cameroun. Ceci sous-entend que les panneaux solaires qu’on va mettre à Dschang ne peuvent pas être les mêmes que ceux qu’on va mettre au Nord. Ce sont des aspects techniques que nous devons, aujourd’hui, mettre à disposition des maires pour qu’ils puissent mieux choisir la qualité des équipements compatibles au projet qu’ils doivent réaliser dans leur commune.
Et quid de la norme, s’agissant des activités du C4PER ?
L’une des questions centrales sur lesquelles le C4PER va travailler c’est d’essayer de mettre à la disposition des communes la norme. Parce qu’aujourd’hui, le Chinois qui fabrique les panneaux solaires ne peut pas nous dicter la norme. C’est nous qui allons lui montrer ce dont nous avons besoin, parce que nous connaissons la norme et c’est nous qui commandons. Et nous vérifions son offre si elle correspond à nos besoins, si ça correspond à notre norme.
Je vous remercie.
Merci également.
Propos recueillis par Augustin Roger MOMOKANA