Il fallait s’y attendre, la Commune de Dschang est un territoire où des risques d’implosions existent. Ils sont liés à la politique d’assainissement urbaine, à la cohabitation des personnes déplacées internes avec les populations hôtes, à la gestion des ressources hydriques, à l’accès à la terre, à la pratique des loisirs, au faible pouvoir d’achat des déplacés de la crise anglophone, etc.
Jeudi 6 mars 2024, dans la salle des réunions du centre de la promotion de la femme et de la famille à Dschang, l’association Horizon Jeune a procédé à la restitution de l’enquête sur la cartographie digitale des risques et vulnérabilités liés aux conflits dans la Commune de Dschang.
L’enquête s’inscrit dans le cadre du Projet d’amélioration de la participation des jeunes pour le dialogue et la cohésion sociale. Elle a été réalisée par Feuh Sie Consulting, un cabinet spécialisé sur les Questions Jeunesse, avec l’appui financier du Service Civique pour la Paix (ZFP) du GIZ.
« Les données recueillis présentent une forte masculinité toxique et un conflit d’égalité de genre dans les communautés. 64 sur les 81 personnes enquêtés affirment avoir été témoins d’un acte de violence basée sur le genre », conclue l’étude conduite sur le terrain par Luc FONGANG du cabinet Feuh Sie Consulting.
Réalisée dans cinq grands villages de la ville de Dschang, cette enquête a permis de relever les principales zones conflictogènes, les types de conflits. Si le plus grand pourcentage de la ville est sujet aux conflits, il va sans dire que ces conflits sont comportementaux et non comportementaux (discrimination dans la distribution des services sociaux de base, difficultés liées à l’insertion sociale, xénophobie, barrières linguistiques, etc.)
« Mon souhait est que la cohésion sociale entre les personnes déplacées et les populations hôtes soient effective. Cela passe par la mobilisation et l’engagement de chacun d’entre nous. Si je le fait et que l’autres n’agit pas, on n’aura pas la cohésion sociale recherchée. Si chacun balaie devant sa porte, Dschang sera propre et il fera bon vivre pour tout le monde », explique Ambrosia VENSIYRI qui dénonce l’inaction des uns et des autres dans la lutte contre l’insalubrité urbaine à Dschang.
La manifestation de ces crises se fait à travers la violence verbale, les disputes et les insultes, les violences physiques, les violences économiques, la menace de mort, la chosification de la fille, les violences émotionnelles, les crimes passionnels, entre autres.
L’atelier de restitution s’est déroulé en présentes de 50 leaders jeunes qui se sont déployés sur le terrain dans ce cadre, mais également du maire jeune de Dschang, AWOUNANG AZONGOUA Michel, du chef du village Ngui, Sa Majesté DOMBOU Nestor, de l’imam à la Mosquée centrale de Dschang, Ibrahim DASSABI, de la présidente des Personnes déplacées internes vivant à Dschang, Ambrosia VENSIYRI, du représentant du GIZ, David HONKER, et du représentant du délégué départemental des affaires sociales.
« La commune de Dschang va tirer un grand avantage des résultats de l’enquête. Horizon Jeune a répondu à la question « comment faire pour diminuer la peur dans les familles? Les interpellations formulées contre la commune ont été relevées et seront transmises à qui de droit qui saura les capitaliser. »
Il est possible de minimiser la courbe ascendante de crises dans la commune de Dschang. L’attention du maire a été attirée en ce qui concerne sa politique de pré-collecte des déchets où les prix de participation des populations varient d’un citoyen à l’autre. Par conséquence certains habitants vident leurs poubelles dans les lits des cours d’eau, sur la voie publique ou chez les voisins. Le Quartier Haoussa ne figure pas dans les quartiers bénéficiaires de la pré-collecte, par conséquent vivent avec leurs déchets pendant des mois. L’accès à l’eau potable s’est rendu si compliqué au point où les jeunes du quartier s’organisent pour ravitailler les ménages des personnes indigentes une fois par semaine.
A Ngui, village jadis réputé pour sa plateforme de compostage des déchets biodégradables, l’on se frotte les mains pour l’impact du projet d’amélioration de la participation des jeunes pour le dialogue et la cohésion sociale a sur les jeunes. Non seulement il a permis d’identifier les sources et les types de conflits dans le village, mais il a aussi permis aux jeunes du village de d’apprendre à participer au bien-être de la communauté.
Sa Majesté DOMBOU Nestor explique : « le projet a apporté un plus aux jeunes de mon village. Hier ces enfants ne savaient pas qu’ils pouvaient se mobiliser pour effectuer des travaux d’assainissement dans le village. Ils nettoient les bordures des rues, cures les caniveaux. Et pour ce faire ils ont rassemblées leurs amis déplacés internes qui n’ont pas hésités pour se mettre ensemble avec eux. Cela s’est fait de manière si normale et facile que désormais pour plancher sur la marche du village, on ne peut pas laisser les déplacés internes de côtés. Ils sont invités pour donner leurs points de vue. C’est cela la cohésion sociale, le vivre ensemble dont on parle. »
Le Programme Service Civique pour la Paix est une approche très spécifique qui permet à la coopération allemande de pouvoir aider ses partenaires de la société civile à s’impliquer dans la lutte contre les conflits afin de favoriser la cohésion sociale. « Ce qui a été fait à Dschang est satisfaisant avec la cartographie digitale et la cartographie. C’est un bel exemple pour d’autres partenaires dans la construction de la paix au Cameroun. Cette cartographie est un début et vous avez ces jeunes qui ont beaucoup appris à participant au projet. La spécificité de Dschang c’est la grande mobilisation des jeunes », a expliqué David HONKER.
Augustin Roger MOMOKANA